Les
premières recherches pour le développement
d'un appareil pouvant répondre au programme
FX américain (qui aboutira au McDonnel-Douglas
F-15) commencèrent à la fin de
l'année 1969 chez les 3 constructeurs
majeurs que comptait l'URSS : Mig, Yakolev et
Sukhoï. Cependant, ces premières
études étaient réalisées
sur fond propre. Finalement, les autorités
autorisèrent la poursuite des études
afin de développer un chasseur de quatrième
"génération" dans le
cadre du programme PFI (Perspektivny Frontovoy
Istrebitel ou Prospective Tactical Fighter).
Au début des années 70, Sukhoï
avait une charge de travail importante. En effet,
le bureau d'étude travaillait en même
temps sur le Su-24, le T-4 et sur des améliorations
des Su-15 et 17. Initialement, seul le "designer"
Vladimir Antonov travaillait sur ce projet et
il traça les premières ébauches
du nouveau chasseur pendant l'été
1969. Puis le rejoignirent les ingénieurs
Oleg Samoylovitch et Valery Nikolayenko. La
principale caractéristique de ce nouveau
chasseur concernait une forte intégration
aérodynamique. Autrement dit, le fuselage
et la voilure ne formaient qu'un ensemble. Les
nacelles moteurs étaient indépendantes
et très éloignées l'une
de l'autre. Le fuselage participait à
la portance générale. Des apex
importants faisaient la jonction entre le fuselage
et la pointe avant. L'aile, de forme ogivale,
était particulièrement épurée.
Deux dérives prenaient place sur le dessus
des nacelles moteurs. Deux grandes quilles de
stabilisation prenaient place sous ces dernières.
Tous ces éléments contribuaient
à un bon comportement aux forts angles
d'attaques. Dès le début du programme,
le nouveau chasseur fut pensé comme très
instable et son contrôle devait être
assuré par des commandes de vol électriques.
Après les premières ébauches,
les ingénieurs de Sukhoï soumirent
leurs modèles aux experts du TsAGI qui
rejetèrent le concept "aérodynamique
intégré". Sukhoï étudia
donc en parallèle des modèles
à l'aérodynamique "classique".
C'est pourquoi certaines maquettes ressemblent
fortement au F-15. Après études,
le TsAGI apporta son soutien au premier concept
de Sukhoï.
A
partir de 1971, les spécifications du
programme F-15 commencèrent à
être connu en URSS et les premières
spécifications du programme PFI furent
élaborées avec un point d'honneur
à avoir des performances supérieures
de 10% au F-15. C'est ainsi que le futur appareil
devait avoir une vitesse maximale de Mach 2.5,
une vitesse au niveau de la mer de 1500 km/h,
un taux de montée de 350 mètres
par seconde, un plafond de 20000 mètres,
un facteur de charge de 9 G, un rapport poids-poussée
de 1,2 et surtout un rayon d'action de 2500
km sans réservoirs supplémentaires.
A
la fin de l'année 1971, le bureau d'étude
de Sukhoï forma deux équipes pour
travailler sur les deux configurations retenues
: une première reprenant le concept d'aérodynamique
intégrée et désignée
T-10-1 et une seconde dite "classique"
désigné T-10-2. Attention toutefois
à ne pas confondre ces deux désignations
avec celles données aux prototypes en
1977 / 1978. La désignation T-10 signifie
qu'il s'agit du dixième appareil construit
par Sukhoï avec une voilure en delta -
la lettre T étant pour "Treugolnyi"
ou triangulaire. Le T-10-1 était sous
la responsabilité de V.A. Nikolayenko
et V.I. Antonov tandis que le T-10-2 l'était
sous celle de A.M. Polyakov et A.I. Andrianov.
La configuration du T-10-2 était très
similaire au F-15. A savoir deux entrées
d'air latéralement placées et
biseautées. Une aile placée sur
le dessus du fuselage et deux réacteurs
placés cote à cote.
En
1972, le conseil scientifique et technique du
ministère de l'armée de l'air
russe reçut les propositions des trois
bureaux d'études. MIG présenta
son concept sous la désignation de Mig-29,
Yakovlev présenta quant à lui
le Yak-45 et 47. Sukhoï présenta
les deux configurations étudiées.
Des 5 appareils présentés, le
T-10-1 était sans aucun doute le plus
moderne. MIG présenta un appareil proche
dans sa configuration générale
au T-10-2, c'est à dire ne retenant pas
le concept d'aérodynamique intégrée
tandis que Yak présentait des appareils
au design plutôt "vieux" : les
réacteurs étaient placés
dans des nacelles indépendantes prenant
place à mi-longueur de la voilure à
la manière du Me-262 ! Deux mois plus
tard, le conseil se réunit à nouveau
et cette fois MIG présenta un nouvel
appareil intégrant cette fois le concept
d'aérodynamique intégrée
mais de plus petite taille que le T-10-1. Le
conseil rejeta les propositions de Yakovlev
et divisa le programme PFI en deux. A l'instar
de l'US Air Force, l'URSS opta à la fin
de l'année 1972 pour deux appareils complémentaires.
Un appareil "lourd" de la classe du
F-15 : le T-10-1 et un appareil "léger"
de la classe du F-16 : le Mig-29.
Sukhoï
étudia de nombreuses configurations entre
1970 et 1975 : Entrées d'air placées
sous le fuselage et de même forme que
l'Ye-8, circulaire avec une pointe comme sur
le SR-71, dérives inclinées vers
l'extérieure, etc . Finalement la configuration
finale se rapprochait des premières ébauches
de 1972 mais en plus imposant. L'aile de forme
ogivale se prolongeait en avant par un imposant
apex pour faire la liaison avec le fuselage
avant. Les entrées d'air prenaient place
sous le fuselage et étaient de forme
rectangulaire en biseaux. Les dérives
étaient droites et placées sur
le dessus des fuseaux moteurs. Ces derniers
étaient très écartés
l'un de l'autre.
Le
T-10 :
La
valse des prototypes :
Le
premier prototype du T-10 (codé "10
bleu" sur le fuselage) à été
construit dans les propres ateliers du bureau
d'étude du Sukhoï a partir de 1975.
Pavel Sukhoï décéda le 15
septembre 1975 et c'est finalement Mikhail Simonov
qui prit en main le développement du
T-10 début février 1976. Il supervisa
le développement, la construction et
les essais en vol jusqu'en 1979. La construction
du T-10-1 prit fin au début de l'année
1977 et fut transporté sur le terrain
de Zhukovsky dans la banlieu de Moscou.
Le
chef des pilotes d'essai de Sukhoï, Vladimir
S. Iliouchin (le fils du fondateur de l'OKB
Ilyouchin), lui à fait pendre l'air pour
la première fois le vendredi 20 mai 1977.
L'AL-31F n'étant pas encore disponible,
le premier T-10 fut motorisé par deux
AL-21F-3 (le moteur du su-17) de 109,84 kN.
Pendant les 8 mois qui suivirent il effectua
38 vols. Il rejoignit finalement le musée
de Monino en 1985 après avoir accomplit
la totalité de son programme d'essais.
En
1978, Sukhoï commença la construction
d'un second prototype. Malheureusement ce second
prototype s'écrasa le 7 mai 1978. Le
pilote d'essai, Yevgeny Solovyov, se tua après
une éjection en dehors des paramètres
du siège éjectable. L'enquête
détermina que l'appareil se rompit en
vol suite à un facteur de charge trop
élevé. Il semble que ce deuxième
prototype soit celui sur lequel fut monté
les commandes de vol électriques. Un
autre prototype s'écrasa plus tard au
cours d'un vol d'essai à vitesse maximale.
La partie extérieure gauche de la voilure
et la dérive gauche se brisèrent
net et il fallut tout le talent de Nikolaï
Sadovnikov pour ramener l'avion.
Le
troisième T-10 (codé "310")
fut construit dans l'usine Komsomolsk avant
d'être transporté dans les ateliers
de Sukhoï pour y être terminé
en août 1978. Il fut motorisé par
des AL-31F en Mars 1979 et commença les
essais de roulage. Cependant, il ne fut pas
autorisé à prendre l'air car ses
réacteurs avaient encore de trop fortes
limitations. Finalement, il prit l'air pour
la première fois le 3 août 1979
suivi du T-10-4 le 31 octobre de la même
année. Ces deux prototypes furent tout
d'abord utilisés pour les tests de l'AL-31F.
Le T-10-3 fut équipé par la suite
d'une crosse d'appontage et simula des appontages
sur piste de même que des essais de décollage
sur rampe à partir du 24 juillet 1982.
Cela démontre l'intérêt
que porta très tôt Sukhoï
dans le développement d'une version navalisée.
Quant au T-10-4 (codé "410"),
il servit aux essais de radar. Les prototypes
suivant, T-10-5, T-10-6, T-10-9, T-10-10 et
T-10-11 ont été construit dans
l'usine de Komsomolsk entre 1980 et 1982 avec
la cellule d'essai statique T-10-8. Chaque prototype
diffère sensiblement du précédent
par de petits détails. Le T-10-11 avait
par exemple les dérives inclinées
vers l'extérieur. Le T-10-5 (qui fut
prêt en Juin 1980) avait quant a lui un
IRST devant le pare-brise. En 1982, un total
de 9 prototypes avaient été construit.
Sept étaient propulsé par des
AL-21F et deux par des AL-31FN. A la fin du
programme d'essais, le T-10-5 rejoignit l'académie
de l'armée de l'air de Tver, le
T-10-9 l'école d'ingénieurs de
l'armée de l'air de Riga, le T-10-10
celle de Kiev et le T-10-11 celle de Zhukovsky.
La
première mention du Su-27 à l'Ouest
fut faite par le magazine suisse "International
defense review" en août 1977. Plus
tard, un satellite américain repérera
le Su-27 et le Mig-29 sur la piste du centre
d'essai de Ramienskoye (en fait Zhukovsky) mais
son existence n'est révélée
au public occidental qu'en 1979 par le département
américain de la défense. Il fut
alors désigné par le nom de code
" RAM-K ". Cette photo satellite fut
la seule image de ce nouvel avion dont l'Ouest
disposa jusqu'au 21 juillet 1985, date à
laquelle une chaîne de télévision
russe diffusa un documentaire sur la vie Pavel
Sukhoï - qui était décédé
10 ans auparavant. Dans ce documentaire, une
séquence de 10 secondes montrait le premier
vol du T-10. L'OTAN lui attribua par la suite
la désignation de "Flanker-A".
Problèmes
aérodynamiques
Si
l'on observe bien les diverses photos du T-10,
on s'aperçoit que le premier prototype
est relativement "propre" pendant
sa construction de même qu'avant, pendant
et juste après son premier vol. Mais
si l'on regarde attentivement les photos suivantes
de même que celles des autres prototypes,
on s'aperçoit que plusieurs "artifices"
aérodynamiques sont venus perturber les
lignes de l'appareil. Deux nouvelles cloisons
de décrochages sont venues s'implanter
sur le dessus des ailes et du fuselage. Des
"barrières" anti-fluttées
sont apparues à la base des saumons de
voilure et sur le bord d'attaque des dérives.
Tous
ces éléments tendent à
croire que le T-10 rencontra de sérieux
problèmes aérodynamiques au cours
de son programme d'essais en vol. Un autre point
pour le moins étonnant concernent la
"hauteur" très faible des points
d'emports de missiles sous les ailes. Il faut
en effet laisser suffisamment de place à
la couche limite pour ne pas perturber l'écoulement
de l'air autour du profil de l'aile et aussi
assurer une séparation "propre"
du missile. Les aérofreins, de par leur
position, généraient également
un phénomène de flutter, lorsqu'ils
étaient actionnés.
En
dépit de certaines améliorations
(aérodynamique, motrices, etc .) les
essais en vol de même que diverses simulations
montrèrent que le T-10 ne sera pas capable
de prendre le dessus sur le F-15 et cela dans
un rapport de 1 pour 1,35 en faveur de l'appareil
américain. De même, les performances
en terme de distance franchissable et de vitesses
ne répondaient pas aux spécifications.
Identification
:
Le
T-10 est reconnaissable de par ses extrémités
de voilures arrondies, son train avant s'escamotant
vers l'arrière et placé très
en avant sous la pointe avant, ses dérives
implantées sur les fuseaux des réacteurs,
de "capots" entourant les tuyères
d'éjection des réacteurs (excepté
sur le T-10-3), de sommet de dérives
non brisés (que l'on retrouve sur les
Su-35/37/30 MKK), à la présence
de perche sur le bord d'attaque des dérives
et à une verrière sans montant
se glissant vers l'arrière. Absence d'IRST
(uniquement pour les prototypes T-10-1 a -3),
de "cône" de queue, de quilles
stabilisatrices et de rails lance-missiles en
bout d'aile. A noter que les trappes du train
principal servaient également d'aérofreins.
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